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15/01/2008

La réforme de l'Etat au Canada (3) De la stratégie avant toute chose

Trois années ont été nécessaires pour résorber le déficit, cinq pour mettre en œuvre l’ensemble des décisions prises, mais seulement six mois pour arrêter toutes les grandes décisions. Le programme de réduction des dépenses fut donc rapidement mis en œuvre. Toutes les dépenses publiques furent examinées, dans tous les domaines, sans tabou, avec l’exigence de porter un regard neuf sur les missions fondamentales de l’Etat et leurs évolutions possibles d’un point de vue stratégique.

Une gouvernance inventive

Un ministre de plein exercice fut nommé pour piloter la réforme, à la tête d’un sous-comité du Conseil des ministres mandaté pour bâtir un consensus et proposer un plan d’action. Cette structure s’appuyait sur un deuxième comité, le Comité de sous-ministres, composé celui-ci de hauts fonctionnaires chargés d’évaluer les propositions des ministères. L’ensemble du dispositif était chapeauté par un Comité plénier composé de tous les ministres sous la présidence du Premier ministre, ce comité ayant pour rôle de procéder aux grands arbitrages en assurant la solidarité interministérielle.

Il est à noter que les réformes les plus ambitieuses issues de ce dispositif n’ont pas été imposées mais ont émergé de la fonction publique elle-même dès lors que la démarche s’inscrivait dans un cadre interministériel en faisant le pari de la confiance.

Examen de programmes

Le nombre de ministères diminua de près de 30 %, passant de 32 à 23. Les salaires publics furent gelés pendant 3 ans. « L’examen des programmes » qui fut mis en œuvre se fixait pour objectif de ramener le déficit fédéral de 6 à 3 % du PIB. Pour atteindre cet objectif, les dépenses devaient être abaissées de 20 % sans augmenter les impôts des particuliers et en augmentant très peu la fiscalité des entreprises.

Cette notion d’examen de programmes présentait l’intérêt d’éviter des réductions uniformes dans toutes les administrations en intégrant une réflexion sur les priorités politiques. Les subventions aux entreprises furent ainsi réduites de 60 %, les budgets des ministères de l’industrie et des transports baissèrent de 50 %, ceux affectés à l’environnement, à la culture, à l’aide internationale et à la pêche furent réduits entre 50 et 20 % et tous les autres budgets, à une seule exception (les affaires indiennes et du Nord), furent diminués.

Service au citoyen

Ces révisions budgétaires s’accompagnèrent de réorganisations administratives. Des services furent supprimés, d’autres regroupés. Les relations entre le niveau fédéral et les provinces furent clarifiées ; des missions importantes leur furent déléguées en matière de transports, de formation ou de loisirs.

Certaines missions, comme la navigation aérienne, furent transférés au secteur privé. Les dispositifs d’assurance-chômage furent revus en un sens plus incitatif. Pour faciliter la baisse des effectifs dans la fonction publique, une administration temporaire fut mise en place pour superviser tous les recrutements des administrations avec l’objectif de privilégier les reclassements internes liés aux suppressions de postes.

Beaucoup d’évolutions concrètes de fonctionnement se sont greffées autour de cette réforme. Le droit de la fonction publique a été assoupli (loi du 7 novembre 2003). Les procédures budgétaires ont été remises à plat. Les dépenses publiques font aujourd’hui l’objet d’un audit régulier. La culture de gestion par les objectifs a été développée à travers le Planning Reporting Accountability Structure mis en place en 1996.

De même, la notion de service au citoyen a connu d’importants développements et fait désormais l’objet de publications régulières rendant compte des résultats obtenus ; simultanément, la mise en place de guichets uniques s’est généralisée. Ces évolutions ont été rendues possibles grâce à un large recours à l’e-administration, le Canada se classant ainsi avec constance depuis plusieurs années en tête du classement réalisé par Accenture sur la qualité des services électroniques proposés aux citoyens.

Beau résultat. Est-il transposable ?

07/01/2008

France/Amérique : un éclairage anthropologique sur la gestion du changement

Une trame de réflexion sur le thème : que peut apporter de plus intéressant, au regard des problématiques françaises, le cas de l’Amérique du Nord à une étude comparative à vocation pratique sur le sujet : "communiquer la réforme" ?

1°) Un éclairage anthropologique
La prise en compte de la culture comme enjeu essentiel de la réforme

Aspects culturels

- une culture de la responsabilité (« accountability » vs indifférenciation)
- le positivisme des comportements (pro-activité vs esprit critique)
- un rapport conquérant au temps (avenir vs passé)

Aspects socio-politiques

- la confiance dans des institutions équilibrées, facteur de compromis
- forte capacité de remise en cause de ce qui ne marche pas (New Deal, Reaganomics)
- approche partenariale et régulatrice de l’action publique

2°) Une recherche appliquée
Un management caractérisé par une recherche organisée et pragmatique de l’efficacité

Apports théoriques

- la psychologie de l’engagement ou la communication par l’action
- Palo Alto et la gestion de la dimension thérapeutique du changement
- l’apport de la recherche managériale appliquée (P. Drucker, etc)

pm. A noter aussi l’existence d’une école canadienne de la communication de changement autour de Collerette, Schneider, Legris et Giroux qui préfère l’approche socio-managériale aux techniques du marketing.

Atouts managériaux

- une culture pragmatique centrée sur l’action et la mesure des résultats
- l’efficacité collective d’une approche organisationnelle conçue comme un process
- le moteur du leadership et les politiques de reconnaissance et de motivation

3°) Des techniques éprouvées
La mise en œuvre de techniques de marketing socio-politique innovantes

Elaboration

- la portée facilitatrice de la culture de la gouvernance : règles, contrôle et pédagogie
- l’apport des think tanks et des lobbies (idées et réseaux) en amont
- l’élaboration et la gestion des marques politiques (moteurs, résistances, dynamique)

Déploiement

- un management interne du changement emprunté aux méthodes de l’entreprise
- la force de pénétration des approches multimedias
- la culture du client et de l’évaluation transposées du consommateur au citoyen

4°) Des illustrations significatives
Des exemples différenciés entre USA et Canada, avec des points forts partagés

Réformes récentes

- aux Etats-Unis, une réforme de l’administration s’appuyant sur la nécessité de redresser l’image de celle-ci dans le cadre du Government and Performance Act (1993) et du National Partnership for Reiventing Government (1998)
- une réforme de l’Etat au Canada essentiellement commandée, dans les années 90, par la nécessité de redresser les finances publiques, et qui s’est étendue à l’ensemble des structures et modes d’action publics à travers un discours souverainiste et citoyen

Points forts

- construction d’une communication préparatoire adaptée aux cibles et aux acteurs
- un pilotage volontariste mais pragmatique, s’appuyant sur l’expérimentation
- une large utilisation du web comme outil de communication et de productivité


Cette trame constituait une sorte de point de départ au travail mené pour le compte de l'Institut Montaigne en Amérique du Nord (pm. L'Institut publiera son rapport sur cette question au début du printemps). Les travaux qui ont suivi ont été pour l'essentiel des analyses de réformes spécifiques, que je publierai également dans la foulée car elles apportent un éclairage, cette fois technique, aux entretiens que j'ai mené en décembre, à Washington, sur ce sujet.

Cela vous inspire ? D'autres pistes à suggérer ?

On est souvent marqué par ce préjugé que les modèles français et américains seraient trop différents pour être rapprochés ; mais, au terme de cette étude, je n'en suis pas si sûr. Et vous, que pensez-vous de tout cela ? La résistance française au changement et la passion des Américains pour le nouveau : mythes ou réalités ?

14/12/2007

L'âne, l'éléphant, le web et les lobbies (entretien n°1/8 avec Jeff Surrell, chez Edelman)

Je commence ici la publication des compte rendus d'entretiens menés à Washington DC pour le compte de l'Institut Montaigne dans le cadre de l'étude que nous réalisons sur le thème : "communiquer la réforme".

La com est son métier

Jeff Surrell est Executive Vice President d’Edelman. Fondée dès 1952 par Daniel J. Edelman, un pionnier des relations publiques qu’il a promues comme domaine d’intervention propre, distinct de la publicité, l’agence est la plus grosse entité indépendante de relations publiques de la place. Elle a notamment compté parmi ses dirigeants Michael Deaver, ancien conseiller en communication de Ronald Reagan.

Edelman a une cinquantaine de bureaux dans le monde et compte 3000 employés, dont 200 travaillent à Washington. L’agence intègre un large spectre de clients (énergie, alimentation, santé, télécommunications…) et d’interventions (lobbying, veille, communication de crise, reputation management…), avec une orientation particulière affaires publiques à Washington.

Artillerie lourde

La communication politique opère aux Etats-Unis dans un cadre contraint du fait en particulier de la nouvelle législation sur le financement de la vie politique mise en place à l’initiative du sénateur MacCain en 2002, qui limite les montants des dons pendant les campagnes électorales.

La pratique consistant à associer les spécialistes de la communication dès l’origine des projets de réforme s’est fortement développée dans les milieux gouvernementaux, à la suite des pratiques aujourd’hui généralisées au sein des grandes compagnies privées (la campagne environnementale de Wall Mart est un cas de référence récent dans ce domaine).

Les développements de la communication politique au sens large peuvent s’appuyer aux Etats-Unis, au-delà des 450 membres du Congrès, des 100 Sénateurs et dizaines de comités et sous-comités institutionnels que compte Washington, sur un personnel politique de quelque 25 000 personnes, dont le quart environ occupe une fonction en relation avec la communication et les medias.

Lobbies contre lobbies

Beaucoup de projets gouvernementaux donnent lieu ici à des batailles de lobbies titanesques. C’est par exemple le cas du projet de loi sur le frêt régulièrement réexaminé par le Congrès, dont les enjeux financiers se chiffrent en milliards de dollars pour les principales parties intéressées, en l’occurrence camionneurs et rail.

Le dernier épisode en date a vu une action intensive des camionneurs auprès du Congrès pour rattraper le terrain perdu, mobilisation qui s’est appuyée sur des études d’opinion fines (notamment à travers des focus groups) permettant de combattre le projet de loi en s’appuyant sur les principaux inconvénients exprimés par les citoyens, en l’espèce les interruptions de circulation qui seraient induites par l’accroissement de la place du rail.

Un consensus sinon rien

Un des facteurs clés de succès d’une réforme gouvernementale aux Etats-Unis tient à la capacité d’une élaboration bi-partisane du projet de loi concerné dans la mesure où elle neutralise par avance les oppositions potentielles.

Ce fut par exemple le cas avec la réforme de l’éducation primaire « No Child Left Behind », à laquelle ont été associées des personnalités démocrates de renom telles que Ted Kennedy ou George Miller. A contrario, le seul engagement du Président permet difficilement de remporter l’adhésion.

Le sens de la formule

L’élaboration de « crafty » messages (à la fois ingénieux et retors) joue un rôle clé. Le cas de la tentative de réforme des retraites en donne un exemple connu avec le remplacement de « privés » par « personnels » à propos des comptes d’épargne (autres exemples à suivre suite à la réunion chez Luntz & Maslansky)

Il est à noter toutefois que l’échec de la tentative de réforme des retraites s’explique aussi par un mauvais timing : alors qu’elle passait par des investissements en bourse plus importants, elle a ainsi été proposée juste après une forte baisse des valeurs à Wall Street.

Au-delà de Washington, localiser les messages peut aussi favoriser les réformes. Classiquement, des débats comme celui portant sur les standards environnementaux (C.A.F.E., Corporate Average Fuel Economy) s’appuient ainsi largement sur des éléments liés aux emplois locaux qui seraient potentiellement concernés par une modification des normes dans tel ou tel Etat. Inversement, c’est parce qu’il n’était pas de la région qu’une personnalité comme Henry Kissinger a pu, dans le Michigan, être récusée pour intervenir sur une question sensible relative au libre-échange agricole.

"A soft bigotry of lower expectation"

L’importance d’une formule juste est aussi avérée dans la réforme de l’éducation. Ainsi la formule de George Bush stigmatisant les travers de la complaisance à l’égard des minorités défavorisées (a « soft bigotry of lower expectation ») a fait mouche et contribué à convaincre qu’il était nécessaire de relever le niveau de l’éducation primaire à travers des standards fédéraux plus exigeants que les normes, diverses et globalement moins élevées, qui étaient fixées par les différents Etats. Condoleezza Rice a même confié que cette formule avait été le déclencheur de son ralliement à George Bush.

Les blogs au centre du débat

L’importance des blogs dans le débat politique s’est cristallisée aux Etats-Unis sur 10 à 15 blogs majeurs (plus quelques sites) qui font l’opinion en ligne. Ces blogs sont de fait suivis chaque jour par 10 à 20 000 lecteurs influents. Parmi ces blogs, on peut par exemple mentionner Daily Kos (démocrate) ou Drudgereport (républicain).

L’importance de la blogosphère s’étend aux grands enjeux de société. Sur les questions environnementales par exemple, un site tel que Treehugger.com est, avec plus de 1 500 000 visiteurs mensuels, une référence centrale capable d’orienter fortement le débat public. De tels blogs sont désormais l’objet de toutes les attentions dans les stratégies d’influence : voyages de presse ou réunions thématiques particulières sont ainsi régulièrement proposés à ses animateurs sur des sujets d’actualité sensibles.

Sécurité sociale, le retour

Dans le domaine de la santé, l’initiative « Divided we fail » illustre certes le pouvoir des lobbies, d’autant plus quand ils s’allient en réunissant, en l’occurrence, à la fois l’AARP, le BRT (Business Roundtable), le SEU (Service Employees Union) et le NFIB (National Federation of Independant Business). Elle atteste, simultanément, de la puissance confirmée des plateformes internet sur les grands sujets du débat socio-politique.

Le logo de cette initiative, déjà médiatisée par ailleurs notamment à la télévision, associe l’âne démocrate et l’éléphant républicain pour appeler à un consensus sur la réforme du système de santé.

Il est intéressant de noter que cette réforme est présentée moins comme un droit social que comme un élément de la compétitivité à long terme du pays. Cela, porté par des lobbies économiques, pourrait de fait contribuer à faire avancer un sujet qui été combattu avec virulence sur le plan idéologique sous la présidence Clinton.

Chères études

Pour analyser l’opinion, de nombreux focus groups sont organisés en permanence. Beaucoup de ces groupes portent d’ailleurs sur des membres du Congrès, du moins de leurs équipes (cf le nombre de personnes dédiées à la communication). Mais ces études sont également de plus en plus réalisées à partir d’investigations sur internet.

La montée en puissance d’internet dans les grandes campagnes de communication en faveur des grandes réformes ou des sujets sensibles est précisément une conséquence directe des études qui montrent que, autant la défiance augmente vis-à-vis des instances (entreprises, institutions) et medias traditionnels (même si la télévision et la presse demeurent des références bien établies), autant la confiance est de plus en plus associée au réseaux sociaux qui, au-delà d’internet, touchent à des communautés de proximité ou d’affinités (collègues, amis et famille).

Confiance et transparence

Il faut souligner à cet égard que le baromètre établi par Edelman dans plusieurs grandes zones culturelles montre une défiance envers les institutions et les medias traditionnels bien plus marquée en Europe, et notamment en France, qu’aux Etats-Unis.

Cela tient sans doute à une transparence institutionnelle culturellement très différente entre les deux pays, ainsi qu’à un rôle régulateur beaucoup plus marqué des contre-pouvoirs en Amérique.

28/10/2007

De la croissance... (5) Communication : des défis pour mobiliser

A bien y réfléchir, la communication n'a de sens qu'au travers d'une différence. Mais elle ne s'épanouit pleinement aussi que dans un climat de confiance (ceux qui en doutent n'ont qu'à concevoir une magnifique plaquette corporate dans un climat de fusion-acquisition). Le sujet revient d'autant plus sur le devant de la scène que la France confirme, dans les enquêtes récentes, sa propension à la défiance. Au-delà, à partir de ce socle sur lequel il faut bâtir, il y a la mécanique de l'envie, c'est-à-dire la dynamique qui doit tenter de capter les espaces et l'air du temps.


5.1 – Développer la confiance au sein des organisations

Il existe des méthodes assez solides pour bâtir sur la confiance, par exemple celle reposant sur l’analyse et la mise en dynamique de quelques thèmes clés : lisibilité de la stratégie, pérennité de l’organisation, respect des règles du jeu, degré d’adhésion, reconnaissance des rôles individuels et collectifs. Développée pour les grandes entreprises, mais avec des possibilités d’adaptation intéressantes vers la sphère publique pour accompagner l’évolution annoncée des administrations. Investissement humain lourd et à haut niveau exigé dans le pilotage de telles démarches : ce n’est pas un gadget, pas plus qu'un cache-misère.

5.2 – Organiser des conférences de personnalités dans les lycées

Un moyen aussi d’attirer l’attention, de susciter un autre regard ou des vocations sur des problématiques très actuelles et notamment économiques, pour mieux faire connaître l’entreprise, ses réalités et ses défis, ses métiers. Salons et autres carrefours ne remplacent pas les interventions et échanges directs avec des responsables de valeur (patrons, journalistes, experts, sportifs de haut niveau, artistes, etc), capables de faire passer des messages, de transmettre l’envie de faire, d’ouvrir des horizons au-delà des parcours convenus (et de la préférence française pour l’administration). Combien de professeurs passionnants et combien de déclics féconds pour chacun au cours d'une scolarité ? Cela devrait être un coeur du métier, mais ce n'est pas si facile : ouvrons donc des espaces à ceux qui portent et incarnent des messages forts de réalisation.

5.3 – Lancer les inititiatives citoyennes pour l’environnement

Au-delà du Grenelle et pour démultiplier la dynamique, c’est un bon terrain d’application pour le développement de concours et d’opérations de mécénat. Avec la vertu supplémentaire, sur le plan non seulement de l’incitation à faire mais aussi du progrès écologique, d’impliquer par l’action, au-delà des prises de conscience générales dont on voit bien que, sorti des aspects fiscaux, elles tournent à vide. A l’instar du thème de la sécurité dans les entreprises industrielles, c’est de plus un bon thème d’entrée dans le changement parce qu’il produit davantage de consensus que de conflit. Un levier puissant, en particulier vers les plus jeunes générations.

5.4 – Créer une plateforme idées / actions

Des outils de communication spécifiques (plateformes web / blogs) sont sans doute à créer pour accompagner la promotion de ces sujets et, comme c’est déjà le cas, pour enrichir et élargir les travaux de la Commission. Il y a de bons exemples du côté des think tanks américains, ou même parmi les meilleurs français. Apporte d’autres éclairages, accompagne la dynamique (cf le media est le message), favorise la diffusion. Mais un outil qui doit aussi s’inscrire dans une perspective pédagogique d’aide au passage à l’acte. Suppose aussi une véritable animation sur la durée.


C'est donc de communication au sens large dont il s'agit ici, et moins de beaux outils que de vraies dynamiques. Communiquer pour rassembler, donner envie, mobiliser, créer du mouvement. Et vous, quelles initiatives recommanderiez-vous pour mieux donner à chacun l'envie d'agir et prendre davantage... d'initiatives ?

15/09/2007

Politique et compagnie (1) Je t'aime, moi non plus

Sur un site principalement consacré à l'entreprise, j'ai consacré de longs développements au marketing politique tel que l'a façonné la dernière campagne présidentielle américaine.

Beaucoup des stratégies et des techniques qui s'y sont déployées ont d'ailleurs, soit dit en passant, une portée qui, dépassant le seul champ de la politique, s'imbriquent avec les évolutions les plus récentes des modes de communication qui, depuis lors, ont littéralement explosé. Outil un temps révolutionnaire d'intervention dans le débat public, le blog a ainsi largement essaimé au sein de la société civile dans son ensemble. Il en va de même pour les outils du marketing relationnel dont les techniques s'affinent chaque jour davantage.

Mais, au-delà de ce débordement vers le champ social, la relation elle-même entre la politique et l'entreprise apparaît en pleine mutation.

Certes, ces deux grands domaines d'action ont longtemps entretenu, sinon aux Etats-Unis, du moins en France, des rapports de méfiance, quand ce n'est pas d'affrontement. A l'exception de libéraux isolés ou de colbertistes convaincus, les politiques n'entendaient souvent pas grand chose aux choses de l'économie et méprisaient ordinairement le monde de l'entreprise. François Mitterrand à sa manière, puis Jacques Chirac qui méprisait tant l'industrie, illustrent assez bien ce phénomène, au plus haut niveau de l'Etat, au long des deux décennies qui viennent de s'achever. La figure électorale du terroir l'emportait alors, et de loin, sur la conquête des nouveaux marchés.

Au-delà du cercle restreint de quelques patrons, catholiques de gauche pour l'essentiel, l'entreprise était, de son côté, réputée ne pas entendre grand chose aux considérations d'intérêt général et à l'infléchissement qu'une apparente meilleure prise en compte de celui-ci aurait dû, dans l'esprit de nombres d'élus, apporter à certaines décisions microéconomiques, qu'il s'agisse d'emploi, d'investissement ou de délocalisation. Encore un effort, Messieurs les entrepreneurs ! semblait se lamenter en choeur une bonne partie de la classe politique pour laquelle le monde semblait un assemblage de cantons.

Mais la réciproque n'était pas moins vraie, et parfois même plus virulente. A l'égard de la politique, les dirigeants d'entreprise hésitaient, le plus souvent, entre la raillerie et le procès. Raillerie des petites cuisines électorales, de terroirs précisément, quand il fallait se battre sur des fronts si lointains, souvent hostiles, et si peu familiers. Procès de décisions, mauvaises, et de rapports, approximatifs, qui ne faisaient guère avancer la cause de l'entreprise, quand ils ne la contrecarraient pas plus franchement. Combien de décisions retardées ou au contraire tronquées pour cause de proximité d'échéances électorales ? On s'en accoutumait mais cela finissait, à la longue, par faire des dégâts ici quand on se développait ailleurs. L'on pouvait certes continuer de monter sur les tonneaux pour haranguer la foule, mais ce n'était plus à l'entrée des usines qui se montaient ailleurs.

A la politique, le monde de l'entreprise reprochait ses décisions à crédit et ses illusions douloureuses - son manque, en clair, de courage et d'intégrité, que permettait la possibilité, au moins temporaire, de s'exonérer des rigueurs de la gestion. Rocard pouvait bien dire : "Quand on cesse de compter, c'est la peine des hommes que l'on cesse de compter", cela ne compta guère et l'on continuait, avec les principes de base des finances publiques aussi bien qu'avec les régles les plus élémentaires du capitalisme, à préférer l'illusion qui paie au courage qui coûte. Là encore, cela finirait bien par se payer - nous y sommes presque.

Pourtant, entre ces deux mondes, les lignes bougent.