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20/01/2011

Rebondir en temps de crise (2) La revanche de la récré

Cela nous ramène au concept anglo-saxon de la « serendipity », sorte de hasard heureux qui peut se définir comme l’art de découvrir ou de créer quelque chose sans l’avoir précisément cherché. Un état d’esprit qui ne fonctionne que si l’on se fixe un objectif précis et qui exige une attitude mentale axée sur la détermination, la curiosité, l’effort et la patience.

S’il est par ailleurs nécessaire de communiquer en période de crise, il est préférable de se concentrer sur un seul message, ce qui implique d’être au clair en amont sur son objectif, son positionnement et ses cibles. « Tous les grands communicants, rappelle Bommelaer, le savent. Il vous faut trouver les mots clés et la façon forte, unique et originale de faire passer votre message principal ». Ne reste plus qu’à répéter par la suite ce message central. Bref, l’efficacité en ce domaine se conjugue aussi mal avec la propension à la divagation du propos qu’avec une habitude culturelle plus ancrée dans notre pays qui consiste à s’obliger en toutes circonstances à la modestie en s’interdisant d’afficher ses réussites.

Au contraire, être porteur d’un message clair et fort peut utilement aider à conjuguer lisibilité et visibilité, ce qui vaut pour les individus autant que pour les entreprises. A l’âge du storytelling, il est également utile de rappeler que nous n’usons que trop peu souvent de la capacité des histoires à susciter la curiosité et à faire passer des messages. Une « arme de persuasion massive » dont nous n’utilisons ordinairement guère plus de 20 % des possibilités. Ayez donc au moins une histoire pour chaque grande idée que vous défendez, recommande l’auteur.

Profitez-en également pour construire votre propre vision de la crise, pour « faire la différence avec le magma verbal ambiant en adoptant un discours réfléchi et construit sur la récession ». Les leaders les plus habiles en ce domaine ont bien compris que l’essentiel « n’est pas d’avoir raison sur la durée, mais d’avoir une pertinence évolutive et assez souple pour pouvoir s’adapter à des circonstances aussi changeantes qu’évolutives ».

La revanche de la récré

Il y a une satisfaction dans cette affaire : c’est la revanche des pros de la récré sur les bons élèves. Ceux qui réussissent le mieux en période de crise ne sont en effet pas ceux qui, tels les bons élèves, répliquent avec application les recettes de l’école et du passé, mais ceux qui explorent, vont au contact des autres et montrent une capacité singulière à la socialisation (Bommelaer est aussi un spécialiste du réseau ; il est notamment l’auteur de « Trouver le bon job grâce au réseau » et « Booster sa carrière grâce au réseau »). La recherche (Eagly & Carli) montre que les meilleurs managers qui consacrent moins de temps que les autres aux tâches traditionnelles pour mieux se concentrer sur le développement des relations sont aussi ceux qui progressent le mieux dans leur vie professionnelle. La récré dans ce contexte, c’est ce lieu magique où « se nouent les alliances, circule l’information et se passe la vraie vie ».

Quant à la recherche d’emploi, inutile de préciser que, dans une situation où 70 % des postes de cadres confirmés passent par le réseau, c’est un networking bien mené et le plus en amont possible qui permettra de s’insérer au mieux dans les opportunités disponibles. Cela permettra aussi d’éviter ce que Bommelaer nomme les quatre dictatures du marché de l’emploi : celle du CV (vu en vingt secondes sans rencontre), du copié-cloné (on recherche le même), de l’âge (on est désormais reconnu senior à 47 ans) et du diplôme (sans le bon, point de salut).

Nouvelles catégories

Dans ce contexte, le credo de l’auteur, c’est celui de Susan Jeffer : qui ose, gagne. L’auteur rappelle à cet égard le mot de John Kennedy : « Les risques et conséquences qui découlent de l’action ne sont rien comparativement aux risques et conséquences d’une confortable inaction ». Et cela dans un monde et au milieu d’une crise qui nous commandent de cesser de penser et de vouloir agir avec les cadres et les catégories du XXème siècle. « L’histoire du XXIème siècle est d’ores et déjà dominée par l’incertitude et la volatilité, les ruptures et les surprises de tous ordres. Autant donc être prêt à vivre ces nouvelles ruptures. C’est aussi le crédo des spécialistes des nouvelles technologies à Harvard qui intègrent de plus en plus dans les systèmes de management les règles permettant de gérer au mieux l’incertitude.

La tâche paraîtra-t-elle trop vaste qu’un découpage en une série d’actions concrètes et positives permettra de progresser vers le but que l’on s’est fixé. C’est la recommandation d’Albert Bandura dans son livre sur l’auto-efficacité. Plus la personne concernée est persuadée de pouvoir réussir, plus elle agit et atteint ses objectifs. Plus elle réussit, en acquérant ou imitant des comportements adaptés, plus elle se fixe – ou accepte – des tâches de plus en plus difficiles.

Investir dans la confiance

Investir dans la confiance est aussi une piste à privilégier, spécialement dans un pays auquel elle fait cruellement défaut, comme l’ont rappelé récemment Yann Algan et Pierre Cahuc dans « La société de défiance ». A la question : en règle générale, est-il possible de faire confiance aux autres ? la France se classe en effet au 24ème rang sur 26 pays étudiés, juste devant la Turquie et le Portugal. Voilà un avantage stratégique encore largement méconnu, à tel point que Covey la considère comme la priorité n°1 des années à venir. Cela n’exclut pas la confrontation, mais doit à tout le moins conduire à la pratiquer de façon positive, à travers ce que les psychologues nomment l’assertivité.

Pour cela, rien de tel que de redécouvrir le potentiel de « l’intelligence émotionnelle développée notamment par Daniel Goleman. Si un QI supérieur à 140 continue encore à être pris en considération, le « quotient émotionnel » monte en puissance. La clé, c’est l’harmonie sociale. La contribution décisive du QE, c’est en effet de permettre la pleine expression du travail en équipe, bien au-delà de la seule addition des QI individuels (2/3).

18/01/2011

Rebondir en temps de crise (1) Territoire de l'expérience optimale

« Dans la vie, il n’y a pas de solutions. Il y a des forces en marche : il faut les créer, et les solutions suivent ». C’est sous l’égide de ce mot de Saint-Exupéry que Hervé Bommelaer, consultant en outplacement et en gestion de carrière, fait avec « Rebondir en temps de crise – 50 bons réflexes au quotidien » (Eyrolles), une œuvre utile, c’est-à-dire, stimulante et efficace pour peu que l’on veuille bien sortir un instant des schémas usuels et de l’habituelle scepticisme à l’égard d’une approche plus proactive de la vie aussi bien au plan professionnel que personnel.

Ce n’est pas que nous manquons de volontarisme, c’est que nous manquons souvent, sinon d’énergie, du moins de méthode. Le meilleur de l’expérience américaine, qui nourrit tout naturellement les expériences de coaching, pourrait bien résider dans cette idée simple que, peut-être pas tout, mais beaucoup nous est possible si nous voulons bien en construire le cheminement plutôt qu’en attendre l’avènement.

Que recommande Bommelaer à cet égard ? Du sang-froid d’abord au beau milieu de la crise, plutôt que de céder à la sinistrose et à la paralysie ambiantes, et de la hauteur de vue. En période de crise, il est en effet « préférable de moins pelleter, mais de le faire à des endroits différents » parce que « c’est la qualité des idées et la réactivité face à un environnement en mutation rapide et chaotique qui fera la différence ». A chacun de diversifier ses sources et ses contacts pour renouveler la vision de son environnement et de son univers professionnel. Ah, comme les habitudes sont commodes, et comme elles mènent toujours aux mêmes constats qui ne nous font pas avancer d’un iota…

L’expérience optimale du « flow »

Ce contexte de crise rend bien sûr inopérants aussi bien la frilosité que le repli et davantage encore la résistance au changement. Une posture nouvelle qui passe par un questionnement simple : qu’est-ce que je ferais si je n’avais pas de contraintes financières ? Et qu’est-ce qui m’empêche de le faire maintenant ? s’interroge ainsi l’auteur. Le choix est finalement assez simple entre subir ou agir. Suivre des rails qui nous ont souvent fait perdre de vue la direction en cours de route ; ou bien se donner les moyens de réintroduire dans nos existences résignées l’énergie de projets excitants.

L’expérience du « flow », repérée par Mihaly Csikszentmihalyi et qui donne à certains moments particuliers de réalisation ce mélange de sentiment de parfaite maîtrise et d’enchantement profond peut aussi aider à se reconnecter avec son énergie et son talent propres. Si l’exigence de la tâche est élevée mais les capacités de l’individu sont réduites dans un domaine donné, l’anxiété se développera. En sens inverse (faibles exigences, fortes capacités), on sombre dans l’ennui. L’idéal est donc de se placer dans cette courbe centrale qui fait progresser ensemble les défis auxquels nous sommes confrontés et notre capacité à y répondre positivement. C’est le territoire de l’expérience optimale.

Cette approche n’est pas sans rappeler ce que dit Luc Albert du changement sous l’angle de l’employabilité : ce qui est coupable dans le monde de l’entreprise, ce n’est pas de demander aux gens de changer, c’est le contraire, qui les enterre sûrement avant l’heure. Là-dessus, Anthony Robbins, expert en PNL, rappelle quelques principes salutaires : il n’est pas nécessaire de tout comprendre avant d’agir ; les êtres humains sont notre principale resource (ce qu’il faut naturellement comprendre en un sens différent des « ressources humaines ») ; le travail est un jeu ; ou encore, il n’y a pas de réussite durable sans engagement (ou sans passion diraient les coachs de Harvard). Car le constat est là : nous n’exploitons en général que 20 à 30 % de notre potentiel. Ce qui semble nous laisser un peu de marge de progression.

La stratégie de l’océan bleu

Or l’espace du progrès personnel passe en grande partie par notre capacité à établir des relations de partenariat et de coopération avec nos interlocuteurs : responsables, équipes, clients, contacts divers aussi bien que futures relations. Conjuguée à une authentique créativité, cette capacité à créer de nouvelles relations peut se révéler très puissante. La stratégie dite de « l’Océan bleu » popularisée par Chan Kim & Renée Mauborgne, qui consiste à aller jeter ses filets là où personne n’est encore allé en s’éloignant des zones où le combat entre concurrents fait rage, gagne de ce point de vue à être méditée. C’est, rappelle Hervé Bommelaer, typiquement ce que Steve Jobs a réalisé en s’écartant du marché des ordinateurs pour exploiter celui de la musique en ligne.  Bref, pour qui veut bien se mettre en mouvement, de la crise à l’opportunité, il n’y a qu’un pas qui peut donner bien des longueurs d’avance.

Le livre est aussi un florilège de citations américaines volontaristes, tel encore ce mot de Robert Kennedy : « Il y a ceux qui voient les choses telles qu’elles sont et se disent : « pourquoi ». Et il y a ceux qui rêvent les choses telles qu’elles devraient être et qui se disent : « pourquoi pas » ». Cela compense après tout un travers national bien résumé par Bommelaer : en France, nous sommes les champions du monde des idées, mais nous sommes beaucoup moins performants pour les concrétiser… Bref, une bonne idée formidablement mise en œuvre bat toutes les fabuleuses idées mal orchestrées.

Eloge de la « sérendipité »

Lorsqu’aux antipodes de ces success stories, nous partons de plus bas, de situations difficiles, l’expérience des survivants peut aider. Elle repose fondamentalement sur la capacité à garder confiance, le sens de la solidarité, l’aptitude à s’adapter à des conditions extrêmes. Sans négliger la capacité à s’extraire, ne serait-ce que quelques minutes par jours, de la violence ou de l’épuisement. Pour Amanda Ripley, auteure de « The Unthinkable : Who Survives When Disaster Strikes – and Why », le rescapé réagit d’autant plus efficacement qu’il accepte l’idée de chaos et cherche des solutions pour s’adapter à la nouvelle donne.

La chance y aurait-elle sa part ? Bien sûr, encore ne faut-il pas lui attribuer plus que ce qu’elle peut offrir. Dans « The Luck Factor », Richard Wiseman montre ainsi que les chanceux se distinguent des malchanceux par plusieurs facteurs : ils savent ce qu’ils veulent, se fixent des objectifs à la fois ambitieux et réalistes, sont plus curieux, fuient la routine et sont ouverts au changement. Ils ont confiance, osent et n’ont pas peur de l’échec. Ils suscitent la sympathie, relativisent les contrariétés et, fait singulier, se fient pour 80 % d’entre eux à leur intuition qui joue un grand rôle dans leurs choix professionnels. Bref, autant de facteurs qui se révèlent avoir en fin de compte peu à voir avec la chance.

Mal aimée des sociétés occidentales qui lui préfèrent la rationalité, la logique, les certitudes et la modélisation, l’intuition se révèle en réalité une précieuse alliée pour déceler, à travers les crises, les ferments d’un monde nouveau. C’est le sujet auquel s’est intéressé Malcolm Gladwell (« La force de l’intuition »)  où il montre notamment que plus le cerveau travaille sur des sujets différents, plus il est capable d’’établir des liens inattendus entre eux, ce qui en retour développe l’intuition. « Plus votre « encyclopédie interne » sera fournie et constamment alimentée, plus votre intuition sera favorisée. C’est ainsi que sans diplôme mais en s’appuyant sur son intuition, Maxime Aïach, le fondateur d’Acadomia, a fondé sa société de soutien scolaire à domicile. Cette entreprise est aujourd’hui n°1 dans son domaine et ne cesse de croître (1/3).